Disparition de l'accordéoniste Marcel Azzola que le « Vesoul » de Brel fit résonner dans toutes les têtes de l'hexagone. Entendu au côté des grands noms de la chanson française, il fut aussi un adepte du swing et un grand défenseur de l'accordéon.
C’est la mémoire qui fout la camp, celle de l’argot des « titis » de Ménilmuche, des immigrés italiens qui avaient fui les foudres mussoloniennes ; celle des nuits du Balajo et des bals musette, d’une certaine chanson française dont il accompagna les grands noms : Edith Piaf, Yves Montand, Barbara, Boris Vian, Juliette Gréco, Gilbert Bécaud, Jacques Brel…
Mais c’est presque une insanité de n’accoler au nom d’Azzola que la fameuse apostrophe du « Chauffe, Marcel, chauffe ! » lancée par Jacques Brel lors de la seconde prise studio de « Vesoul » , en 1968, et qui fit de l’accordéoniste un nom connu du grand public.
Outre la soupe populaire – à laquelle nous goûtons non sans plaisir – Marcel Azzola œuvra pour le swing à l’accordéon chromatique et fut un excellent improvisateur. Il est vrai qu’il avait croisé au cours de sa longue carrière des musiciens de l’envergure de Django Reinhardt (lors de la dernière séance d’enregistrement de ce dernier), Stéphane Grappelli, Maurice Vander, Marc Fosset, Christian Escoudé et Didier Lockwood, pour n’en citer que quelques-uns.
Celui qui fut formé adolescent par le fameux Médard Ferrero avait monté un trio qui eut une certaine renommée avec le contrebassiste Patrice Caratini et le guitariste Marc Fosset et largement participé à l’incontournable anthologie Paris Musette concoctée pour le label La Lichère, sous la houlette du rédacteur en chef de Jazz Magazine, Franck Bergerot, et rééditée par Frémeaux & associés en 2018. « Panique », « Explosion » et « Rue de la Chine » sont trois petits bijoux de cet anthologie à chérir qu’il enregistra avec son ami de toujours, le guitariste de jazz manouche Didi Duprat ; des trois, la dernière a été composée par Marcel Azzola lui-même pour dire le nom de la rue de la maternité du vingtième arrondissement où il avait vu le jour le 10 Juillet 1927.
Dans « Afro-Musette » apparaît celui que l’on peut considérer comme son successeur sur les chemins du jazz à l’accordéon : Richard Galliano. Apparition qui témoigne de ce statut d’éclaireur qu’endossa Marcel Azzola pour les générations à venir, militant pour l’entrée de l’accordéon au Conservatoire national supérieur de musique en 2002 et encourageant un Vincent Peirani encore jeune à prendre le relai.
Esprit ouvert, Marcel Azzola ne négligeait pas non plus le monde de la musique classique ; il avait créé un duo en 1982 qui donnait encore des prestations ces derniers mois avec la pianiste Lina Bossati, qui fut une élève des concertistes Yves Nat et Alfred Cortot.