Le label britannique World Circuit Records réédite en vinyle “Né La Thiass”, la toute première cassette de Cheikh Lô : une essence originelle produite en 1995 par un Youssou N’Dour inspiré dans son studio Xippi à Dakar et enregistrée en neuf jours avec le concours des musiciens du Super Etoile.
L’éclat, les fusions, la foi et la voix d’or de Cheikh Lô s’y trouvent déjà, sans détours ni artifices, et c’est à partir des masters originaux restaurés chez Abbey Roads que “Né La Thiass” nous est rendu aujourd’hui dans toute sa fraîcheur. Cheikh Lô est de ces intrépides candides : du Burkina-Faso, ses voyages – initiatiques à n’en pas douter, le conduisent jusqu’à Paris à la fin des années 80. Il y est musicien de studio pendant deux ans, batteur puis guitariste, remarqué notamment par Papa Wemba et le producteur Ibrahima Sylla, incontournable catalyseur des musiques ouest-africaines et de leurs nombreux croisements.
Mais c’est peut-être avant tout au pays, celui des hommes intègres, que l’enfant Lô développe un goût prononcé pour les mélanges heureux en faisant ses premiers pas de musicien aux côtés du flamboyant orchestre Volta Jazz. Avec Moustapha Maïga en tête et au saxophone, le jeune Cheikh Lô se gorge des classiques de la rumba et du soukouss congolais, mbalax sénégalais, blues mandingues, pulses afro-reggae et chansons cubaines en vogue, goûtant alors à ce qui compose l’essentiel de sa musique et de Né La Thiass.
En 1995, le baladin a quarante ans et son Sénégal d’adoption découvre enfin six titres élégants emmenés par les tambours sabar et tama, soutenus par des orchestrations latines et la voix de Youssou N’Dour sur « Set » et « Guiss Guiss », sublimés par une flûte aux inflexions peul sur « Boul Di Tagale » et le chant incarné d’un Cheikh Lô résilient sur « Né La Thiass », excellent conteur en tout point. Un succès immédiat déployé à l’international grâce au flair de Nick Gold – fondateur et nez de World Circuit Records, l’amenant quatre disques, un Kora Awards et deux tours du monde plus tard à jouer avec Oumou Sangaré, Ibrahim Maalouf, Flavia Coelho, Fixi, Tony Allen ou encore Ernest Ranglin.
Près de 25 ans plus tard, la cassette devient donc vinyle, augmenté d’un livret complet et illustré. Ni la pochette ni la musique n’ont pris une ride, Cheikh Lô tout juste une ou deux. Toujours vêtu des gigantesques dreadlocks et des tenues-patchwork chatoyantes des Baye Fall, le musicien poursuit ses explorations cosmopolites avec, en prime, un très beau souvenir de jeunesse.
Cheikh Lô, Né La Thiass (World Circuit)