La musique brésilienne, et MPB en particulier, est et a toujours été une expression de l'esprit brésilien : "Je pense que la Música Popular Brasileira est le plus grand symbole de notre identité nationale", affirme la chanteuse Joyce, originaire de Rio de Janeiro.

La disparition de João Gilberto, le 6 juillet 2019, a refermé le plus prestigieux chapitre de l’histoire des musiques brésiliennes. « Il fut une illumination mystique », réagit alors Caetano Veloso pour décrire l’inventeur, au tournant des années 1950 et 1960, de la bossa nova. Cette épure de samba, enluminée par des mélodies, rythmes et harmonies sophistiqués sous l’influence du jazz, constitua le terreau – lui-même nourri par des métissages séculaires – dans lequel s’est enraciné l’arbre luxuriant de la MPB. « Je crois que la musique populaire brésilienne est le plus grand symbole de notre identité nationale », estime la chanteuse Joyce.

Alors que la MPB a été formalisée dans le sillage de la bossa nova, ses origines sont évidemment plus anciennes et trouvent leur source dans le métissage induit par le commerce triangulaire débuté au XVIe siècle. Le croisement des peuples indigènes, des colons européens et des esclaves africains sur un immense territoire a ensemencé une variété d’expressions comme nulle part ailleurs. Cette variété de genres (le choro de Pixiguinha, le baião de Luis Gonzaga, la samba de Noel Rosa…) est synthétisée dans la MPB qui intègre aussi les influences anglo-saxonnes. Tandis que la junte militaire verrouille le pays suite au coup d’Etat de  1964, les pionniers du mouvement martèlent à la fois la richesse du patrimoine national, la sophistication héritée de la bossa nova et l’ouverture généreuse au monde alentours – que les militaires le veuillent ou non.



Les festivals

De 1965 à 1969, le Festival de Música Popular Brasileira est un événement qui colle chaque année le public devant son petit écran. « Arrastão », une chanson d’Edu Lobo et Vinicius de Moraes interprétée par Elis Regina, marque l’acte de naissance de la MPB en remportant la première édition du concours. Dès lors, les festivals agrègent la première génération du genre, tout en propulsant l’industrie phonographique nationale. Les candidats ont pour noms Caetano Veloso, Gilberto Gil, Nara Leão, Geraldo Vandré, Chico Buarque, Roberto Carlos, Jair Rodrigues, Nana Caymmi, Marcos Valle, Milton Nascimento, Tom Zé, Gal Costa… L’imagination prend le pouvoir à une heure de grande écoute. Lors de la dernière édition, en 1969, les guitares électriques sont interdites pour ne pas jeter de l’huile sur un pays en feu. Trop tard : déjà propulsée, la MPB a choisi la voie du progressisme et incarne – plus ou moins selon ses interprètes – une forme de contestation politique et sociale.

 



Le tropicalisme

Lors du Festival de MPB de 1967, Caetano Veloso chante « Alegria, alegria » alors que Gilberto Gil interprète « Domingo no Parque », propulsant ainsi le Tropicalisme, une révolution musicale (déclinée dans les arts plastique et la littérature) qui percute le sédiment brésilien – notamment les rythmes nordestins – et la pop culture anglo-saxonne marquée par le psychédélisme et le mouvement hippie. Les deux Bahianais ne sont pas seuls à la manœuvre du genre, en rupture avec la MPB dont il est pourtant constitué. Os Mutantes, Gal Costa, Tom Zé, Maria Bethânia ou Chico Buarque dynamitent aussi les conventions et prônent la libération des consciences en actionnant des guitares électriques dans des accoutrements de beatniks. Pour la dictature, ç’en est trop : Gilberto Gil et Caetano Veloso sont censurés, embastillés puis contraints à un exil depuis lequel ils vont poursuivre leur œuvre contestataire.



La vague rock

Dans les années 1970, une nouvelle génération engloutit le rock et les musiques afro-américaines : Jorge Ben et son samba-rock perpétué par Seu Jorge, Tim Maia qui engloutit la soul et le disco, etc. Introduit dans les années 1950, propagé dans les années 1960 par le mouvement Jovem Guarda (Roberto Carlos, Erasmo Carlos, Wanderléa), le rock s’épanouit du Minas Gerais (le Clube da Esquina de Milton Nascimento et Lô Borges influencés par les Beatles) au Nordeste (la Invasão Nordestina de Fagner, Alceu Valença et Zé Ramalho). Pour autant, outre la figure tutélaire de Raul Seixas, la scène s’est vraiment constituée après la dictature. Dans les années 1980, le rock brésilien devient même un phénomène de masse grâce à des groupes comme Paralamas do Sucesso, Legião Urbana et Titãs. Un chapelet de noms qui cache souvent le même producteur, André Midani.



L’histoire continue

La MPB n’est pas un genre en soi, mais la conglomération d’artistes dont les esthétiques hétérogènes tirent vers la modernité en absorbant des influences exogènes. Les variétés romantiques de Roberto Carlos, les chansons ciselées de Djavan, le rock théâtral de Ney Matogrosso, le Mangue Beat de Chico Science ou la pop sophistiquée de Marisa Monte appartiennent toutes au même corpus. La MPB est plébiscitée par la classe moyenne, en opposition aux genres plutôt associés aux populations des quartiers périphériques ou des régions rurales : brega, sertanejo, axé, funk, hip-hop… Une chose est certaine, dans les studios de São Paulo ou les discothèques de Belém, les musiques brésiliennes continuent de refléter la vitalité, la diversité et les tensions de la société où elles fleurissent.



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